Pour les supporters du Maroc, le match d’ouverture de la CAN a commencé 6 heures avant le coup d’envoi. Aux abords du Stade Prince Moulay Abdellah se forment déjà des files de fans tous vêtus de rouge pour venir assister à l’événement que 35 millions d’âmes attendent depuis 37 ans. « On ne voit ça qu’une fois dans notre vie », estime Mourad, 28 ans, venu spécialement de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour assister à la rencontre avec ses amis Amar et Yliesse.
Les trois Franciliens ont fait six heures de route la veille depuis la commune d’Oujda jusqu’à Rabat, où ils assisteront à la phase de groupe et à la finale. « Mais si on ne va pas en finale, je revends ma place ! », lance Amar, qui pronostiquait une victoire 3-0 des Lions de l’Atlas ce dimanche avec des réalisations de Brahim Diaz, Ismaël Saibari et Azzedine Ounahi.
« Excusez-moi, vous n’auriez pas un petit billet à vendre ? » interroge Ouail Ouanjine à quelques mètres des premiers portiques de sécurité, sous une pluie battante qui ne décourage pas les centaines de supporters de poursuivre leur progression. L’attaquant de l’AS Panazol (N3), gérant d’une entreprise de transports dans le civil, a fait le déplacement depuis Limoges avec son amie Kaïnna Khelifi, qui espère un coup de chance pour éviter de regarder la rencontre dans la fan-zone.
« Je suis une vendue, aujourd’hui ! » plaisante la Franco-Tunisienne de 21 ans, arborant un large drapeau du Maroc sur ses épaules, qui finira par se procurer un billet pour 1200 dirhams (120 euros) grâce à un intermédiaire contacté sur Whatsapp. Sur le parvis de l’enceinte, Antoine, originaire de Saint-Pierre-du-Perray (Essonne), salue la fluidité du filtrage et la modernité du stade de 69 500 places, largement rénové pour la CAN. « J’ai déjà fait beaucoup de stades, et ça ressemble vraiment aux standards européens ».
Sur les buts, le stade se transforme en volcan
La ferveur des supporters marocains n’a rien à envier non plus aux plus chauds derbys du vieux Continent, bien qu’elle mette du temps à se manifester. Après une cérémonie d’ouverture tout en jeux de lumières marquée par la révélation de l’hymne officiel de la compétition, puis la présentation du Ballon d’Or africain par un Achraf Hakimi acclamé à chaque apparition sur les écrans géants, des « Dima Maghrib » (« Vive le Maghreb » en darija) envahissent les tribunes dès les premières minutes, dans un stade qui s’est rempli entièrement dans le quart d’heure avant le coup d’envoi.
Si le Maroc a démontré sa capacité à assumer la charge logistique d’un évènement décrit par les organisateurs comme la « plus grande CAN de l’histoire », seuls des résultats convainquant des Lions de l’Atlas pourront accorder au tournoi un tel statut dans le coeur de leurs supporters.
Alors que l’avant-match s’était déroulé dans un relatif calme révélateur de la pression qui entoure les Marocains pour leur CAN à domicile, le public accueille par des « olas » chaque passe des joueurs de Walid Regragui , de sifflets chaque prise de balle des Comoriens, et vrombit dès que les Marocains franchissent le camp adverse. Le pénalty sifflé dès la 10e minute électrise la foule, dont l’enthousiasme est cependant douché par l’arrêt de Yannick Pandore devant Soufiane Rahimi. Un faux rythme s’installe et la tension monte.
Une immense bronca accompagne les joueurs à la mi-temps, augmentant la pression sur leurs épaules. Le doute s’installe, les sourires s’estompent. Jusqu’à l’explosion sur le but de Brahim Diaz (55e). Le Stade Prince Moulay Abdallah se transforme alors en volcan, rouge de bonheur. Mais il faudra le superbe retourné d’El-Kaabi à la 74e pour soulager tout un peuple qui, plus que jamais, croit en sa bonne étoile.